Pour développer, sécuriser et renforcer le système électrique ouest-africain, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest a initié la construction d’un marché unique. Son architecture a été pensée pour que ses acteurs (les sociétés publiques ou privées de production, de transport et de distribution d’électricité) puissent faire fonctionner de manière efficace à la fois les centrales de production et les réseaux, en lien avec les sites de consommation.
Pour ce faire, la CEDEAO a créé en 1999, à la suite de son 22ème Sommet de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement des États Membres une institution spécialisée chargée de cette intégration régionale : le Système d’Échanges d’Énergie Électrique Ouest Africain (EEEOA). Elle est chargée de promouvoir et de développer des infrastructures de production et de transport d’électricité, et d’assurer la coordination des échanges d’électricité entre les 14 États membres (tous les pays de la CEDEAO à l’exception du Cap Vert). L’intégration régionale du secteur électrique ouest-africain dans un marché unifié permettra aux populations des États membres de la CEDEAO de bénéficier d’un approvisionnement électrique régulier, fiable et à un coût compétitif.
Rappelons que la région couverte par l’EEEOA est très peu électrifiée : seule 30 % à accès à l’électricité. La consommation totale d’énergie électrique dans la région est de près de 50 000 GWh, dont près de 42 500 GWh sont consommées par trois pays (Nigéria, Ghana et Côte d’Ivoire). Le Nigéria est à lui seul responsable de 57 % de la consommation totale de la région, soit près de 28 500 GWh.
Fournir un cadre physique au marché ouest-africain de l’électricité
Le premier objectif de l’EEEOA est de fournir un cadre « physique » aux échanges, en développant les liaisons transfrontalières et en assurant leur performance. Le réseau électrique de l’EEEOA est divisé en deux zones géographiques, nommées zone A et zone B.
La zone A comprend la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Togo, le Bénin, le Nigéria, le Burkina Faso et le Niger. Les réseaux électriques de ces pays sont tous reliés, grâce aux interconnexions transfrontalières suivantes : Côte d’Ivoire – Burkina Faso, Côte d’Ivoire – Ghana – Togo – Bénin – Nigéria et finalement Nigéria – Niger.
La zone B comprend le Mali, le Sénégal, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Gambie, le Libéria et le Sierra Léone. Actuellement, seule une interconnexion transfrontalière existe, reliant le Sénégal et le Mali. Mais un projet qui vise à relier la Gambie, la Guinée, la Guinée Bissau et le Sénégal à l’aide d’une interconnexion 225 kV est à l’étude.
Ces deux zones ont finalement été connectées en 2012, suite à la mise en service de la ligne d’interconnexion Côte d’Ivoire-Mali. D’autres interconnexions entre les zones A et B sont en cours de construction :
- Une interconnexion 225 kV reliant la Côte d’Ivoire, le Libéria, le Sierra Léone et la Guinée doit être mise en service en 2017.
- Une interconnexion 225 kV reliant le Ghana, le Burkina Faso et le Mali, prévue pour 2018.
En plus de ces exportations utilisant le réseau haute-tension, il existe des échanges transfrontaliers à travers des lignes moyenne-tension : entre le Mali et la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Burkina Faso ou le Bénin et le Togo par exemple.
Adopter des règles de gestion communes
Le renforcement de la coopération entre les différents acteurs ouest-africains passe par une harmonisation des règles de gestion des réseaux électriques au sein de l’EEEOA. C’est dans cette optique que la CEDEAO a mis en place l’Autorité de Régulation Régionale du secteur de l’Électricité (ARREC). Cette institution spécialisée, dont le siège se trouve au Ghana, est chargée d’assurer la régulation des échanges transfrontaliers d’électricité et d’appuyer les organismes nationaux de régulations dans les États membres de la CEDEAO.
La mise en place d’une régulation régionale permettra également d’instaurer un cadre attractif pour les investisseurs internationaux. L’accès aux marchés des capitaux sera essentiel afin de faire face aux besoins énormes de financement pour le développement des infrastructures énergétiques.
A la suite d’études de régulation menées par l’ARREC, une directive sur l’organisation du marché régional de l’électricité a été adoptée en juin 2013. Cette adoption s’est faite non seulement pour améliorer la gouvernance du secteur, mais aussi pour faciliter le développement d’un marché de l’électricité ouest-africain.
Vers la mise en place d’un marché régional de l’électricité
Si la mise en place d’un marché de l’électricité regroupant les États membres de l’EEEOA fait partie des objectifs de la CEDEAO, elle devra se faire progressivement pour que les systèmes électriques nationaux puissent s’y adapter, les organisations locales étant différentes les unes des autres.
Plusieurs principes, déjà définis par l’ARREC et l’EEEOA, régiront le marché ouest-africain de l’électricité : un accès ouvert, équitable et non-discriminatoire aux échanges transfrontaliers d’électricité devra être assuré aux acteurs régionaux. Ceci se fera grâce à la mise en place d’un système d’enchères, permettant d’attribuer les capacités disponibles. Le couplage des marchés résultant permettra à la fois d’optimiser les capacités d’interconnexions et de faciliter la convergence des prix.
La mise en place du marché régional est nécessaire pour résoudre le problème de la répartition inégale des ressources énergétiques entre les pays, et pour combler le fossé entre l’offre et la demande d’électricité.