Où vaut-il mieux être manager ou entrepreneur en Afrique : plutôt dans la zone anglophone ou dans la partie francophone ? Cette dernière serait-elle, comme on l’entend souvent, synonyme de décrochage, alors qu’Afrique anglophone rimerait avec décollage ? Pas si simple.
Les faits sont là : l’indice de développement humain 2013 publié par le Programme des Nations unies pour le développement, qui prend en compte des éléments tels que l’éducation, le niveau de vie ou la santé, révèle que parmi les six Etats les plus mal classés (sur 187), cinq sont des pays d’Afrique francophone : le Burkina Faso, le Mali, le Tchad, la République démocratique du Congo et le Niger, qui ferme la marche. Une chose est sûre, le poids de l’Afrique anglophone est supérieur à celui de l’Afrique francophone avec un rapport démographique triple : 898 milliards de dollars de PIB pour une population de plus de 480 millions, face à un PIB de 163 milliards de dollars pour quelque 170 millions d’habitants. Comparer les pays africains est un exercice délicat. Et pour cause. Il faut tenir compte de l’hétérogénéité en termes géographiques et historiques, en termes de dotation en matières premières – les richesses naturelles, hydrocarbures notamment, sont davantage du côté des pays anglophones (Nigeria, Ghana, Sierra Leone). Ces derniers sont également plus irrigués par des capitaux internationaux et ils font preuve d’une plus grande stabilité politique.Les héritages de la colonisation sont aussi clairement différents. « Les pays d’Afrique anglophone ont été mieux préparés à prendre leur élan au moment de la décolonisation, notamment en matière de gestion des affaires publiques ou d’éducation », note Paul Mercier, directeur de Michael Page Africa, cabinet de recrutement de cadres et de dirigeants. Conséquence : « Le monde anglo-saxon est plus sécurisant pour les entreprises du fait de son système administratif, éducatif et de gouvernement. Les bases sont solides. » En outre, « à l’origine, le système éducatif en Afrique francophone a été conçu pour former des fonctionnaires », rappelle Paul Mercier. D’autre part, le droit anglo-saxon, plus souple et plus pragmatique, bref plus business-friendly, est également plus séduisant pour les investisseurs. « Globalement, la France a fait un copier-coller de son système, alors que les anglophones ont, pour gouverner, appliqué la loi indirecte, en gardant des structures locales », note Jacques Manlay, président de la commission Afrique anglophone au Conseil français des investisseurs en Afrique (CIAN). D’autre part, les pays francophones restent biberonnés par la France, alors que les liens commerciaux des pays anglophones sont nettement plus diversifiés.