Entre la fin de l’année passée et le début de celle-ci, la Maseno school, la plus ancienne école kenyane, s’est pourvue d’un bioréacteur alimenté par les déjections des latrines alentour. Aujourd’hui indépendante énergétiquement, elle apparaît comme un modèle de bâtiment écologique.
L’histoire de cette installation peu commune dans un environnement encore plus insolite a commencé il y a quelques années. Leroy Mwasaru, un élève de la Maseno, décide de trouver une solution pour résoudre un problème écologique qui affecte son école et sa communauté. Des eaux usées, rejetées par les latrines du nouveau dortoir scolaire, s’infiltraient dans la nappe phréatique polluant la seule source d’eau potable de la communauté.
Volontairement, le jeune homme, accompagné de trois compères, avait élaboré les plans d’un Human Waster Bioreactor (HWB), un bioréacteur qui fonctionne aux déjections humaines. Grâce à ce système, une chambre souterraine étanche édifiée sous les latrines devrait récupérer les exécréments et empêcher la pollution de la nappe phréatique.
Sans être entièrement mûrie, l’idée était suffisamment intéressante pour remporter le premier prix de l’ « Innovate Kenya ». Durant la compétition, Leroy et son équipe ont bénéficié des conseils des étudiants du MIT (un groupe qui collabore avec les jeunes ayant de bonnes idées pour les mettre en œuvre). L’Innovate Kenya a permis à l’équipe de se doter d’un prototype fiable pour débuter les travaux, d’un bioréacteur en plastique et de moyens financiers.
C’est sur ces notes d’espoir que s’acheva le premier chapitre de l’aventure du bioréacteur de la Maseno School.
Premières tentatives, premières craintes et premières réussites
Les premiers mois dédiés au test, ce sont des bouses de bovin et des détritus alimentaires de la cantine scolaire qui ont été utilisés pour convaincre les sceptiques, plutôt nombreux, du bien fondé de cette idée. Les résultats obtenus étant concluants, l’équipe s’est rabattue sur la source du problème, les excréments humains. Le biogaz produit a été mis au service de la cantine scolaire dont l’activité mettait en danger la biodiversité autour de l’école.
Coupés pour servir de bois de chauffe, les arbres environnants ont laissé place à des espaces vides depuis la construction de l’école. Avec le biogaz, les aliments étaient cuisinés dans le respect de l’environnement et le personnel de la cantine, heureux, avouait qu’il était satisfait de ne plus être exposé aux fumées des feux de bois.
Ces débuts prometteurs ont encouragé et raffermi les jeunes entrepreneurs dans leur quête.
Viser la perfection
En 2014, c’est à la conférence Techonomy – qui se déroula en Californie – que Leroy Mwasaru a trouvé le terreau nécessaire à la croissance de son projet. A la suite de son voyage, il a créé un deuxième prototype qui sépare les liquides comme l’urine et les parties solides afin d’améliorer la productivité du bioréacteur. En effet, à l’épreuve du terrain, son équipe et lui ont réalisé que l’urine abaissait le niveau de productivité du bioréacteur quand il n’en bloquait pas simplement le fonctionnement.
En attendant d’exploiter pleinement ce nouveau prototype, Leroy Mwasaru a souhaité que sa famille bénéficie de cette technologie. Il a donc conçu un modèle qui s’adapte bien à la cellule familiale. Et pour que sa famille ne soit pas la seule à en jouir il s’apprête, à présent, à le commercialiser.
Des études effectuées par différentes institutions au Kenya ont démontré que les femmes perdent, en moyenne, 8 heures de temps, trois fois par semaine, à collecter du bois. Ce temps, elles pourraient l’utiliser à d’autres fins si elles avaient accès à une source permanente d’énergie.
De plus, la généralisation du bioréacteur servirait à protéger 196 tonnes de bois. Face à ces chiffres, Leroy entend jouer un rôle dans la protection de l’écosystème naturel de son pays. Il veut fonder une entreprise spécialisée dans la fourniture de combustible propre et accessible aux communautés à faibles revenus.